Si les vers sont des attrape-cœur efficaces ?
A priori je dirais non - excusez moi
On me souffle qu’il faudrait commencer
Par avoir des lecteurs pour pouvoir en juger
Soit, supposons donc un lectorat
Bien regardez Ronsard, malgré tous ses sonnets
Barbon mélancolique, il n’a pas trop chopé
Enfin un peu quand même, car introduit
Dans le royaume des lettres et des puissants
- Du fait de son talent. Oui, absolument
Est-elle finie pour moi la saison des amours ?
Le drapeau est en berne, plus de gloire du matin
Coupez c’est dans la boite ? Ça m’a semblé si court
Quarante années d’active, missionnaire, c’est pas rien
D’autant qu’Amour ne pique pas moins, Céline, Guerre :
Elle vous portait le feu dans la bite au premier regard, au premier geste. Ça allait même d’emblée bien plus profond, jusqu’au cœur pour ainsi dire..."
L’horloge biologique a peut-être parlé
On pourra vérifier sur le hub d’internet
Au pire il restera le loisir créatif
Ces mots qui signifient "je vaux bien d’être aimé"
Bite-en-l’air dans la grotte, déjà, du réflexif
J’ai vu le Pausilippe et la mer d’Italie
"Remboursez !" j’ai gueulé, Gérard, mon pauvre ami
Tu verrais le bordel ! La pollution ! Le bruit !
Furioso de klaxons, rai de smog sur Capri
Et les Napolitains ?! C’est le sketch permanent
En crédibilité, on tend vers le néant
Du foot aussi, partout, que veux-tu respecter
Chez ces fous de Diego ? Sfogliatelle ? OK
Comme tu n’en peux plus, tu vas prendre un bateau
Qui t’emmène fissa vers une île, Procida
Ou Ischia - pas Capri (tu le sais, c’est fini)
Là, tu te régénères, tu respires, douce vie !
Tu imprimerais bien tes dents sur un citron
Mais tu lâches le texte : ne pas tourner en rond
Si on peut éviter la grandiloquence, hein ?
Oui, bien sûr. Toutefois, ce #1erMai pourrait
Être un jour historique, celui de la bascule
D’une société issue de la Résistance
À un maillon de plus du marché libéral
Oui, l’heure est grave (tant pis, on n’évitera rien)
S’il n’y a pas de soulèvement populaire
Ce #1erMai, nous ne serons pas ridicules
Nous serons morts, comme les Anglais, brexités
Qui regardent le train de retour vers Dickens
Ou décervelés, comme ces Américains
Attendant leur salut d’un Crassus délavé
Bref, nous serons sujets des riches, anglo-saxons
89, 48, 71
36, 68 : numéros oubliés
Le lent travail de sape des cabinets obscurs
Couplé au broyage culturel médiatique
Dont se charge chez nous le Murdoch de Bretagne
- Ou plutôt du Mordor - aura porté ses fruits
Rien n’est écrit pourtant, le peuple vit encore
Tout finit par partir, tout vient à s’estomper
Les poèmes s’oublient, même l’univers est né
Tout ce fiel irradiant dans ton corps, humeur noire
Tout finira par s’évacuer, sans faire histoire...
Quand le cœur est tombé sur le ventre
Quand tu te lèves las le matin
Cette finitude est ton antre
Tu t’y recomposes pour affronter demain
Et puis outre le temps, comme auxiliaires
Il y a tous les autres malheurs, un large choix
Catastrophes naturelles - ou pas - maladies, guerres
chaque comparaison te remet à l’endroit
Et vois la Shakira ! Elle aussi délaissée
Rolex ou Ferrari, le connard envolé
Tu t’étais fait un film, la connexion n’est pas
T’inquiète, c’est un classique, le vent l’emportera
Lorsque tu as stocké quelqu’un dans ton ventre - sans être enceint(e), on parle ici d’une personne toute formée pas d’un têtard en construction - tu sais que tu vas pouvoir coller, sur le tableau du climat émotionnel, des petits nuages noirs avec éclairs, et qu’il va même sans doute falloir créer des petites étiquettes de cyclones, ouragans, tornades, tsunamis - je propose une spirale sur fond de vague sombre.
Oui, tant que l’autre est dans la tête, poussant sa trombine au premier plan sporadiquement, alt+F4 ferme la fenêtre, tout est encore sous contrôle - mais le virus s’est tout de même introduit, des mesures sont à prendre, il en est encore temps. Lorsque c’est une pulsation du bide qui envoie dans le système un concentré d’il/elle tétanisant, il est trop tard, tu es squatté(e), tu vas devoir composer avec un être résident qui pourra faire la foire la nuit et nuire à ta concentration le jour, quelqu’un qui te fera chanter du Sardou, "elle court, elle court..."
Enfin, ce n’est pas le cancer non plus, inutile de coller une tête de mort sur ton tableau. Dans cette affaire, tu as un allié de poids : le temps. Le temps est un vermifuge puissant qui te fera expulser l’intrus(e) de ton abdomen, la culture te permettant ensuite de faire le ménage dans ta caboche, car oui, cette expérience universelle est bien documentée, les poètes l’ont décrite sous toutes ses formes - je conseille personnellement le laxatif de Ferré, Avec le temps, en respectant toutefois la posologie, car la dépression fait partie des effets secondaires avérés en cas d’écoute prolongée.
Bien sûr, le fait de devoir côtoyer quotidiennement l’avatar de l’alien ne va pas simplifier la guérison. Mais tout lasse, tout passe, toujours, pas d’exception ; au pire le process est plus long, reste confiant(e). Les êtres sociaux sont toujours décevants sur le long terme, et tout à son ersatz : regarde Léo, tombé raide dingue de sa guenon. Enfin tu le sais bien : tu vas en baver. Mais au bout du tunnel est la lumière, la libération au bout du colon. Un matin tout tranquille, tu auras une argile au creux de tes mains, et tu pourras remodeler ton avenir. Je pense toutefois en l’occurrence qu’il est temps d’arrêter l’exercice de Coué car la fonction métaphorique montre des signes de hack. Le monstre est dans la place...
Courage !