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Intuitivement vôtre

Êtres incarnés, chair inspirée, esprits-corps, corps-esprits, âmes protéinées carburant au sucre et baignant dans le gras, nous participons à l’émergence de la Conscience, qui elle sera peut-être éthérée. En tous les cas, nous, les tâcherons existentialistes chargés de recréer Dieu, sommes dans le dur - dans le difficile s’entend car nous évoluons beaucoup dans le mou, le visqueux, le puant, la merde enfin. Mais ce ne sont pas nos anus qui défèquent, ni nos cerveaux qui pensent, c’est là que nous faisons erreur : nous pensons-déféquons avec nos cerveaux-anus (les termes sont réversibles). C’est bien d’en être conscient au moment où des bricolards en blouses blanches, pontifiant comme jamais, nous rabâchent que les portions de codes qu’ils nous injectent, délicatement découpées au couteau de boucher dans du tissu micrométrique, sont tout à fait inoffensives.

C’est surtout important d’une façon plus fondamentale pour ne pas s’en laisser conter par les théoriciens de l’évolution gradualiste qui ne voient que milliards de micro-mutations subies par le vivant sur des milliards d’années et nient toute idée de surgissement endogène, de mutations auto-générées, d’initiative individuelle. Pour ces autres savants, le phasme a mis des millions d’années à devenir brindille, à l’issue d’un (très) long processus de sélection qui a vu tous les phasmes insuffisamment brindilles finir dans l’estomac des prédateurs. Idem pour le caméléon, bénéficiaire d’une mutation assez spectaculaire qui lui a permis de survivre contrairement à ses congénères restés en costume gris. D’où est-elle venue cette mutation ? Comme les autres, des rayons cosmiques - avec un s en plus du pluriel.

Que ces joyeux rayons influent sur les génomes, pourquoi pas ? Mais pourquoi ces yeux aux ciel à l’évocation d’une capacité des êtres chimiques, confrontés à une situation extrême (ou pas), à se modifier ? On parle ici de phénomènes plus radicaux que les éruptions cutanées liées au stress ; on se situe au niveau d’anomalies récemment prises au sérieux comme la parthénogenèse surprise de certains mammifères. Certes, si vous pensez qu’un nez trop long vous empêche de devenir une star, inutile de méditer tous les jours pour obtenir sa régression, allez voir un charcutier. Mais si plusieurs millions d’individus sont promis à une mort certaine du fait d’une inadaptation de leur appendice nasal, ne s’en trouvera-t-il pas un pour générer de l’intérieur sa modification ? Ceux qui balaient l’air de leur revers de mains courroucés devant cette hypothèse ont peut-être un problème avec les échelles relatives du savoir humain et des capacités de la vie. Ces antisceptiques ont longtemps nié aux animaux le droit de posséder une personnalité individuelle ; toutes ces machines animées n’auraient été capables que de réactions déterminées par leur espèce. Il suffit pourtant d’avoir trois chats à la maison pour invalider cette théorie un temps académique.

Une religion monothéiste a métaphoriquement affirmé que tuer l’homme revenait à tuer Dieu. Sans qu’il soit du tout nécessaire d’adhérer à ce club, il est permis de penser que l’homme, et plus largement - vraiment plus largement - tout le vivant, est un mystère épais dont les potentialités nous échappent. À tous, y compris Nimbus et Tournesol. À côté de la science, l’intuition a voix au chapitre, pourvu qu’elle ne s’érige pas en dogme. Ainsi de l’idée que la partie conserverait une connaissance du tout - même si la plupart du temps cette connaissance lui est inaccessible (un peu comme une cellule spécialisée ne peut accéder qu’au code de fabrication de certaines protéines même si son noyau recèle un ADN complet). Et de là procède l’idée que chaque entité autonome, chaque microcosme, s’il est animé par une conscience (l’esprit) n’en est pas moins le produit de toutes ses composantes (formant corps), elles-mêmes pensantes dans une mesure variable.

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