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Les Cantos d’Hypermal

Dans les Les Cantos d’Hypérion de Dan Simmons, on a des vaisseaux-arbres, de la distransportation, des rayons de la mort... on est en pleine SF. Le décor est extra-terrestre, l’époque future, l’auteur est donc contraint de nous peindre des mondes et des civilisations issus de son imagination ; à ce jeu-là, à mon sens, il y a plus fort que Simmons décidément trop Terre à Terre, et anglo-saxon ! Dans l’Hégémonie, le système politique interplanétaire menacé (par des extros pas des cocos), on boit du whisky et de la bière en se souvenant des vers de Yeats ou de Shakespeare. Mais je ne veux pas entrer dans le débat sur les effets de réel en science-fiction ou sur la difficulté de décrire des mondes ex-nihilo, je ne suis ni grand fan ni spécialiste du genre, je note simplement que lorsque l’auteur invente une arme efficace nommée "clap" et qu’il se contente de décrire ses effets sans la raccorder à une quelconque technologie connue au moment de la rédaction de son œuvre, ça passe très bien.

Science-Fiction donc... Assurément, il serait difficile de classer le roman dans un autre genre. Néanmoins, l’essence de ces cantos n’est pas l’anticipation ou la recréation. Le centre du récit, ou plutôt des récits car cette première partie de la fresque contient sept histoires enchâssées dans un récit principal [1], c’est le mal. Le mal incarné dans la figure du "gritche", sorte de monstre de métal liquide aux yeux rouges, très Terminator 2 en fait, et le mal qui fait mal, qui découpe, mutile, brûle vif, écorche, crucifie etc. etc. - amateurs des soirées Domina, Simmons est un ami. La souffrance, on sent que c’est son grand truc, la souffrance et la destruction. Le prêtre qui se crucifie sur un arbre à flammes pour faire crever la croix vivante fichée dans sa poitrine, une stratégie qui lui occasionnera un martyre de sept ans, hmmm ! On sent que ça lui cause de la turgescence au Dan ! Les âmes et les chairs déchirées, y a bon ! Ça monte, ça monte et ça gicle :

... des boules de feu qui entrent en expansion, des étoiles qui meurent, des soleils qui explosent en un brasier de pulsations géantes, des systèmes solaires qui meurent dans un déchaînement de destruction extatique... (P. 209) [2].

Ça a l’air intense, mais perso je préfère des orgasmes plus fun. Du reste, on ne se marre pas beaucoup dans cet univers bondage. On esquissera peut-être un sourire ici :

Sur l’Ancienne Terre, au XXè siècle, une chaîne de restauration rapide a fait fortune rien qu’en vendant à ses clients de la vache morte frite dans de la graisse, assaisonnée de produits cancérigènes et emballée dans de la mousse à base d’hydrocarbures. Neuf cents milliards d’exemplaires ont ainsi été écoulés. (P. 250).

Mais bon, c’est pas tordant non plus. Certains vous diront sans doute que le personnage du poète est parfois amusant. Moi, ce genre de personnage m’horripile. D’abord parce qu’il est clichesque au possible (alcoolique, ironique, sentencieux...), ensuite par ce que c’est encore un avatar de l’auteur et que ces personnages-clones qui servent de porte-voix pour dire la haute idée qu’on a de son rôle de créateur et la petitesse du monde de l’édition ont des fils vraiment trop gros.

Au commencement, voyez-vous, était le Verbe. Et le Verbe prit consistance de chair dans l’univers humain. Seul le poète peut assurer l’expansion de l’univers, en trouvant des raccourcis vers des réalités nouvelles [...] Devenir un vrai poète, c’est devenir Dieu (P. 234).

Et le Dieu Simmons n’est vraiment pas commode. Car il l’avoue, c’est lui qui a provoqué l’apparition du gritche ! (p. 272). Aussi ne conseillerais-je ses œuvres qu’à mes amis goths, et encore, ceux qui ont des tendances SM prononcées. Sinon ça se lit très bien, c’est même prenant, mais malsain, et complaisant.

[1À la fin de ce premier volume, on en a lu trois.

[2De l’édition Pocket, collection Science-Fiction, n°5578.

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