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Gemmes

Il y a quarante ans, un certain Marc Lavoine disait à ma chérie, alors âgée de seize ans, qu’elle avait les yeux révolver. Le bon vendeur fourguait tous les soirs cette came à ses groupies provinciales, sauf que là, en l’occurrence, il disait juste. De fait, les yeux verts diamantins de mon amour en avaient déjà flingué plus d’un, et allaient provoquer par la suite d’épouvantables hécatombes dans la population mâle ; j’en aurais à coup sûr subi la foudre si je n’avais été l’élu.

Car voilà, malgré l’assiduité sans faille de la concurrence, de l’âne brayant ses histoires d’anges et de parking jusqu’aux potes censément les plus loyaux, sans effort, en étant simplement moi - un moi que je n’ai eu cependant cesse d’optimiser conformément aux préconisations de Pindare - malgré l’adversité disais-je, je fus et reste l’élu, le choix de la plus belle femme du monde.

La durée de l’élection impressionne, souvent, dans cette ère du zapping où les amants buzzent "next" à la première contrariété. Qu’est-ce que cette femme piquante, sympa comme tout, fait avec ce mec ? Si on me posait frontalement la question, je répondrais sans doute : "je ne sais pas". Sauf un jour de franchise où je serais capable de dire "John Cazale", sans donner d’explications. Abscons oui, toujours, et le mot est sans doute encore un peu long.

Lumière sur la scène : littoral du D-Day dans les nuances de gris. Fiat blanche sous le crachin. Dedans, un élu, concentré sur l’horizon. Est-il inquiet pour sa réélection ? Non. Tant que vivra la votante.

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