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By nightfall

Un matin, dans un hôtel je ne sais plus où, je regardais entre deux l’émission du matin sur la 4 où une belle pintade présente la météo. Un moment, une chroniqueuse a parlé de ce bouquin, "Crépuscule", et elle vendait drôlement bien la came, quelque chose comme "jamais les rues de New York n’ont à ce point été imprégnées de la psyché d’un personnage..." Tentant, mais ça reste du télé-shopping amélioré. Enfin j’ai quand même retenu le titre et en cherchant un peu, plus tard, j’ai découvert que l’auteur avait écrit The Hours ; alors là évidemment ça change tout.

C’est comme ça que je viens de finir By Nightfall, et c’était bien. Vraiment un bon moment, mais pas non plus le truc inouï ; ça reste des New-Yorkais dans l’art qui ont des soucis divers, essentiellement avec eux-mêmes. Pourquoi pas s’il y a du talent, pourquoi l’originalité, l’exotisme ? C’est vrai, disons juste que le talent n’est pas forcé. Ou en fait, je soupçonne Cunningham de faire un peu parler son personnage principal pour lui dans ce roman. Ce Peter Harris qui regarde ces trucs exposés dans sa galerie ou chez une vieille rombière et qui rejette les vilaines pensées qui lui viennent, ses doutes... et si ces objets n’étaient rien d’autre que des objets ? Et si la littérature ce n’était que des mots avec recette et un zeste d’invention ? Voire l’invention des autres si on est fatigué, comme cet emprunt à Flaubert non signalé :

Silly humans. Banging on a tub to make a bear dance when we would move the stars to pity. [1]

En même temps, comment signaler l’emprunt sans que le pédantisme perde le narrateur qui gagne toujours à se faire oublier ? C’est vrai, et trêve de mesquinerie. Beaucoup de plaisir dans cette écriture discrète et cette psychologie fine. Soit un type marié qui vient d’embrasser son jeune beau-frère... Comment projeter ce grand moment de solitude :

And so he and Mizzy sit side by side in the backseat of the BMW, driving along the consoling normalcy of I-95, surrounded by other people in other cars, most of whom have, in all likelihood, never kissed their brothers-in-law.

Michael Cunningham : By Nightfall. Picador, 2011

[1La parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles. in Madame Bovary

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