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Bombardement chimique

Chimio, rayons. Successivement, sur six mois, minimum. Voilà le programme. On n’a pas pris de notes à l’époque, donc je ne sais plus les fréquences, les produits, le protocole... et je l’ai déjà dit, je ne fais pas œuvre documentaire, je me soulage de ce qui m’a marqué. Donc pas de recherches, du souvenir, du ressenti fossilisé.

L’hôpital de jour, les deux infirmières si dévouées, si agréables, malgré deux téléphones qui sonnent non stop, des parents stressés, des urgences à gérer. Et j’allais oublier : des soins à prodiguer ! L’état de l’hôpital public déjà, en 2001, et encore : dans un service "privilégié". Donc, à peu près toutes les trois semaines, pour la partie chimio, c’est le même truc : après les formalités d’entrée, Fabien subit une première prise de sang (ça fait des siècles que les aiguilles ne l’impressionnent plus) et doit parfois passer une écho cœur. Ensuite, direction le service d’oncologie où une des deux infirmières sympas lui branche sa poche de détergent (après une attente de une à plusieurs heures). Fabien est ensuite conduit dans une chambre où on va attendre qu’un interne lui fasse une autre prise de sang, dont les résultats détermineront si Fabien peut rentrer à la maison ou s’il doit rester dormir à l’hôpital... Autant dire qu’il y a de la tension autour des résultats... Et c’est là qu’on mesure bien que la médecine n’est pas une science "dure". Il y a du mou dans cette science appliquée, de l’humain. En l’occurrence, c’est le taux de globules blancs après chimio qui va décider d’une hospitalisation de contrôle ou d’un retour à la maison. Ce taux est fixé à 2 000 globules par microlitres (pour "microlitres", j’ai finalement utilisé Google quoique j’aie exclu plus haut les recherches...). C’est déjà deux fois moins que le minimum du taux normal (et c’est mon taux habituel à chaque prise de sang depuis la maladie de Fabien). Et bien Fabien est déjà sorti à 600 globules/microlitres ! Pourquoi ? Parce que les médecins avaient confiance en nous, les parents : nous n’exposerions pas Fabien inutilement (pas de supermarchés par exemple) et nous réagirions vite en cas de problème. Bourdieu aurait fait son miel de cette interprétation variable de la norme. Kévin ne serait certainement pas sorti à moins de 1 500...

Pour les cheveux, la chimio post-opération semble plus efficace que celle subie avant l’ablation du rein. Ça tombe dru ; le corps se souvient, il ne dépense pas d’énergie à maintenir le poil - si tant est qu’il ait tenté le coup avant. Fabien se débarrasse de ses paquets de filasse sans aucune émotion. Quand il est chauve, on lui met un bandana, ça fait pirate, il kiffe : trop stylé ! Même à l’école il assumerait. Mais l’école, ce n’est pas pour tout de suite. Après la première chimio on se dit "bon, le gamin récupère ces anticorps en une semaine, il a la pêche, on pourrait discuter d’une scolarisation en pointillés avec la directrice..." Mais à l’hôpital on n’est pas chaud, on nous invite à la prudence : la première séance de chimio se passe crème le plus souvent, surtout avec les enfants, mais après c’est autre chose, à peine remis, l’organisme reprend une dose, vous avez bien vu avant l’opération... C’est vrai, mais... Non, il n’y a pas de mais. L’école, on oublie au moins jusqu’à la fin de la chimio et ce serait plus prudent d’envisager une rescolarisation après les rayons. Ça nous mène au printemps ça. Oui. Bien. Merci.

Même si elle ne se plaint pas, je sais que c’est difficile pour Cécile. Ses nuits de surveillante d’internat lui font quitter la maison tôt - on ne passe plus beaucoup de soirées ensemble - et comme on ne peut pas éternellement solliciter les grands-parents, il faudra nécessairement qu’elle suive moins de cours à la fac. Quant à la préparation du concours de professeur des écoles, la perspective s’éloigne... Pour la femme déterminée qui a repris des études après dix ans dans la coiffure, ayant même fait une terminale à 25 ans - entourée de

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